mardi 27 décembre 2011

De la trouvaille à l'archéologie expérimentale




De la trouvaille à l'archéologie expérimentale

L'exemple du coin monétaire celtique du Mont Vully, CH.
En Suisse Romande, sur le Mont Vully (imposante colline au sud du site de la Tène, dans le canton de Fribourg, entre Neuchâtel et Morat et leurs lacs respectifs), au lieu dit Sur les Planches, le 6 mars 1996, lors d'une prospection, un menu objet en bronze massif apparu après 21 siècles d’oubli.


La petite chose conique porte sur sa face en creux le négatif d’une image, une tête de profil casquée et décorée d’un collier. Il s’agit d’un rarissime outil, un coin monétaire, soit une des deux matrices nécessaires pour imprimer les reliefs des pièces de monnaies lors de leurs fabrications. Ce noyau en bronze devait être contenu dans une pièce ou enclume en fer non retrouvée.

Le coin provient de l’oppidum (place forte) helvète du Mont Vully et date de la première moitié du Ier siècle avant Jésus-Christ.


L’objet peut paraître insignifiant, il l’est pour le profane. Ce n’est certes pas les torques en or du trésor d’Erstfeld (Uri) ou le cratère de la tombe de la dame de Vix (Côte-d’Or, Françe). Cependant pour les amateurs de monnaies et les spécialistes la découverte d’un coin monétaire celtique demeure de la plus haute rareté, unique, comme Erstfeld ou Vix. En 2001 (cf bibliographie Auberson et Geiser, 2001), 42 coins celtiques étaient recensés dans le monde et nombre ne sont plus que des vestiges très corrodés. Celui du Mont Vully offre la particularité d’être en bronze, métal souffrant moins dans le terrain que le fer, de plus il présente une belle et lisse patine foncée. La gravure est particulièrement bien lisible.

 






Vue du coin monétaire retrouvé.

Proposition de reconstitution de l'usage du coin + source.


Conique, long de 24.3 mm, pour une largeur maximale de 17,4 mm et d'un poids de 24,352 gr. La partie gravée à un diamètre irrégulier de 12 x 12,5 mm. Il est conservé au Service archéologique du canton de Fribourg sous le numéro SACF 7232.


Sa composition a depuis été analysée (cf bibliographie Auberson et Geiser, 2001) : cuivre 76 %, étain 21% et plomb 3%. Cet alliage produit un bronze relativement dur, utile pour un outil soumis à des chocs et écrasements.

 
Face du coin.







 
Empreinte produite par le coin.










Le type monétaire qu’il pouvait produire est clairement identifié. Il s’agit d’une imitation gauloise des deniers de la République romaine à la tête de la figuration de Rome coiffée du casque ailé, connu sous le nom de denier gaulois ou quinaire à la légende Kaletedov et présents en nombre dans les fouilles de la Gaule du Centre-Est et de l’Est ; sur les territoires présumés des Lingons (capitale Langres), Eduens (capitale Bibracte), des Séquanes (capitale Besançon) et des Helvètes. Ce type monétaire (et ses variantes régionales) constitue une sorte de monnaie commune et supra-territoriale.


[Denier Sulla, photo manque]


Le quinaire de Kaletedov, le plus répandu dans le Centre Est de la Gaule, servait à plusieurs tribus dont les Helvètes.

  

Après les enseignements, les questions

Curieusement alors que des dizaines de milliers de monnaies celtiques ont été trouvés dans le monde, aucune (des pièces étudiées, publiées et connues de scientifiques) ne corresponds formellement au coin monétaire découvert au Mont Vully.


Quelques quinaires de type Kaletedov, face et dos. Le premier à sa face très descentrée.


Pièce actuelle de 5 centimes (Confédération Helvétique) et quinaire gaulois de type Kaletedov en argent.



L’objet suscite la curiosité des spécialistes. Les examens et les analyses démontrent qu’il a été coulé avec son empreinte, c’est-à-dire que l’image n’a pas été gravée après coup. Et que l’objet a été utilisé, il pourrait même s’être déformé à l’usage et avoir été corrigé à la lime. La genèse de la concavité de la gravure n’est pas établie, d’origine ou engendré par sa déformation à l’usage ? Reste qu’aucun quinaire à la légende Kaletedov connu jusqu’à présent n’offre une face aussi convexe qu’est concave le coin.


Certains ont pensé qu’il aurait pu appartenir à un faussaire de l’époque. Il est en effet facile d’estamper de la cire ramollie sur une monnaie pour en prendre l’empreinte. Puis, de l’enrober dans une gangue de coulée composée d’argile, de charbon et de crottin et d’y verser après séchage et cuisson du bronze liquide selon la technique de la cire perdue. Oui, mais, …, d’autres coins celtiques au noyau en bronze enrobés de fer existent, ce n’est donc par un unicum :

- Coin monétaire dit d’Avenches, trouvé au XIXe siècle (Avenches, Musée romain, inv. 972).
- Coin monétaire « très probablement trouvé en Haute-Alsace » (Bâle, Historisches Museum, inv. 1984.442).

Certes, nous pouvons palabrer longtemps sur l’officialité des coins celtiques retrouvés, de fer comme de bronze. Ici, en l’absence de monnaie de référence soit pour mouler le coin, soit comme preuve de son utilisation, nous attendrons prudents de nouvelles découvertes.


Il est évident que la gravure de coins en fer demeure une opération fort délicate et précise, donc très difficile. Nos tribus celtiques régionales comprenaient certainement d'habiles artisans, mais, il faut admettre que pour les monnaies, plus on entre dans les terres gauloises et que l’on s’éloigne des civilisations méditerranéennes plus les images gravées sont interprétées et simplifiées. Les deniers gaulois ou quinaires, en particulier ceux à la légende Kaletedov sont rarement centrés sur les deux faces, le plus souvent très décentrés et frappés sur des flans trop courts. Peut-on en déduire que si la production monétaire gauloise est peu soigneuse et emportée qu’il en allait de même pour la fabrication de l'outillage ?


Le principe d’échanges monétaires adopté des voisins constituait la valeur de la pièce sur le métal et son poids. Les gravures représentent des sécurités de convenance qui n’ont pas vraiment besoin d’être belles. Cela reflète tout de même les moyens techniques mis en œuvre et contraste avec les productions des cités grecques, pour ne prendre qu’un exemple.

Le cliché du rude et sauvage gaulois relaté par les romains et les grecs antiques et que l’on tempère sous nos latitudes de découvertes en découvertes depuis Napoléon III, trouve bien quelques vieux fondements dans la numismatique. Certes, il demeure impossible de comparer deux cultures aussi différentes, d’autant que nous découlons directement du mariage intelligent et réussi (quoiqu’un peu forcé au départ) des deux dans nos régions : la culture gallo-romaine. On ne peut tout de même pas déclarer que notre romanisation ne nous ait rien amené, ni que les romains ne nous doivent rien. À ce propos culturel et comparatif lisez, sur ce blog mon article : La notion de la beauté entre les Gaulois et les Romains.


La technique de la cire perdue offre de nombreuses facilités, que ce soit pour des artisans officiels ou pour des faussaires, nous l’avons expérimenté. L’outil est sans doute moins résistant qu’un coin gravé en acier trempé, mais, précieux avantage, il peut être aisément reproduit par moulage et même fabriqué en série par un simple artisan local.




L’expérience du faire

Le coin original témoigne, il suscite des études, des hypothèses, des débats, mais il demeure quelque peu inerte dans un coffre fort. Certes, l’utiliser serait un crime et il convient de le conserver dans un écrin d’ouate. À partir de là l’archéologie expérimentale trouve toute son expression et permet d’essayer l’objet, de le faire « parler » et de vivre la frappe avec un « clone » reproduit sur la base des analyses métallographiques, aussi robuste que neuf, comme jadis l’original l’a été.

Raté ou réussie toute expérience de reconstitution, d’archéologie expérimentale, portera un plus, des sensations, des enseignements, des réponses, des suppositions ou questions et orientera des nouvelles expérimentations.


Le projet d’animation

Lors des préparatifs du Festival Vully Celtic (30, 31 août et 1er septembre 2007), organisé par Claude-Alain Gaillet, président de l’Association Pro Vistiliaco <http://www.provistiliaco.ch/f/>, nous avons proposé de copier le coin antique et de l’enrober dans une matrice en fer pour reconstituer un atelier de frappe monétaire personnalisé au site : un évènement, comme l’on dit.

Le fait que le coin de revers n’ait pas (encore) été retrouvé constituait une difficulté pour reproduire la pièce qui se devait (logiquement) d’avoir deux faces. Comme nulle monnaie ne pouvait nous donner exactement l’empreinte de ce dos, puisque aucune pièce provenant du coin trouvé n’est connue, il nous fallait considérer une autre piste. L’idée de dupliquer le coin dans ses dimensions et de l’utiliser en frappe libre, manuelle (non industrielle) posait le souci de l’identification entre pièce antique, copie et faux. Pour ces motifs académiques et des questions évidentes de coût, de poinçons de contrôles des métaux précieux et de la pénibilité de frappe (l'atelier étant destiné essentiellement pour les enfants), il était clair que les pièces seraient frappées en étain et non en argent. Donc, plutôt que de reprendre un dos de quinaire proche (ce que nous avons fait à titre expérimental), nous avons proposé un dos contemporain avec le logo de l’Association Pro Vistiliaco. Celui-ci d’inspiration numismatique reprend le dessin d’avers des potins de la Gaule Centrale, du territoire présumé des Lingons (capitale Langres), à la légende OYINDIA (Vindia) avec deux profils de visages à droite accolés en tête-bêche, de part et d’autre d’un bandeau vertical. Les Lingons faisaient partie de la communauté supra territoriale des quinaires à la légende Kaletedov et le Mont Vully a fourni deux potins « errants » Lingons à la légende OYINDIA (Vindia). Ainsi, le choix graphique ne s’avère pas trop incongru. Les projets idéaux l’entouraient encore d’un contenu épigraphique et d'un millésime numérique modernes.

Deux projets, de revers moderne avec texte.

Le Service archéologique de l’Etat de Fribourg avalisa le projet. Et, fournit le moulage du coin, que j’ai surmoulé et coulé en bronze, suivant la recette de l'alliage donnée par l’analyse métallographique. J’ai soudé le coin avec de l’étain dans un tas en fer, inspiré de la forme du coin d’avers romain retrouvé à Augst (Bâle), constitué ici de la moitié du fer d’un vieux marteau. Dans, le doute, j’ai coulé à la forge (au charbon de bois, car le charbon de pierre n’était pas employé dans l’Antiquité) quatre coins. Deux ont été sertis, un a été patiné et fixé dans une vitrine pour que le public puisse le voir dans son entier et de près (bien que finalement l’original fût exposé sur le site lors du festival) et le quatrième n’a pas été utilisé et refondu car il contenait un fragment de charbon de bois sur sa face.


Désormais, en Suisse, tout est possible en matière de gravure et de micro gravure, cependant la petite Association Pro Vistiliaco ne pouvait supporter le coût important de la gravure 3D de 13 mm de diamètre. Et, c’est avec de la débrouillardise et par une réduction du projet (en supprimant le texte et le millésime) que nous avons mené ce projet à bien avec une gravure laser en deux dimensions sur un coin de revers préalablement forgé en acier.

La gravure très droite retenait le métal des flans frappés, je l’ai adoucie à l'échoppe. Ensuite, l’extrémité gravée du coin fut rougie à la forge et trempée dans de l’eau pour la durcir, puis, partiellement réchauffée pour obtenir un revenu évitant les casses à l’usage.

Détail de l'intérieur de la vitrine consacrée au Mont Vully. Une copie du coins monétaire en bronze patiné est exposée en haut à gauche. Des copies de monnaies de potins patinées (vertes) tels que ceux retrouvé lors des fouilles sont présentées avec à côté une reproduction de potins coulés encore assemblés en arbre de coulée. En bas le coin reconstitué, prêt à l'emploi et dans un fragment d'amphore quelque quinaires reconstitués. 

Les essais de frappe en étain se sont avérés très positifs, tant avec le coin de revers en acier trempé qu’avec la matrice d'avers en bronze sertie dans une masse de fer.

Il ne restait plus qu’à présenter l’activité au public, lors du festival.



Le Festival Vully Celtic

La journée du vendredi 30 août 2007 était réservée aux classes scolaires. Nous avons établi des exposés et pour chaque classe, demandé aux enseignants de nous désigner un volontaire, chargé de frapper la monnaie de sa classe sous le regard de ses camarades, qui tous voulaient frapper, mais le programme minuté (quasi militaire) ne le permettait pas, cependant, ils pouvaient revenir individuellement durant le week-end.

Le samedi et le dimanche, tout le festival et par conséquent l’atelier de frappe monétaire a été pris d’assaut par un public énorme. 













Détail d'une portion de la file devant notre poste de frappe.

À notre grand désespoir, lors de pics, certains enfants n’ont pas hésité à faire une file jusqu’à une heure et un quart en plein soleil pour pouvoir frapper leur tout petit quinaire du Mont Vully. Déjà devenu mythique sur le site : T’as fais ta monnaie ? On aurait pu vendre nos monnaies aux enchères … Mais, nous nous sommes contentés de faire plaisir aux petits frappeurs et de demeurer fidèle à notre mission pédagogique.

Sans compter les classes, les démonstrations et les adultes, samedi et dimanche les enfants ont frappés 1294 pièces, l'un après l'autre, avec un seul poste de frappe.



Carte faite pour note animation au Vully-Celtic et emportée par les frappeurs et le public intéressé.


Plus tard, nous avons fourni 300 pièces pour que les organisateurs les distribuent comme don aux bénévoles. Ainsi le coin expérimental d’avers du Mont Vully a produit un peu plus de 1830 pièces en étain.

Les 300 pièces.



Sachet de 300 pièces.


























Et, pour boucler la boucle …

Désireux de laisser une trace in situ sur le Mont Vully et dans le temps nous avons éparpillé à l’emplacement de la frappe trente quinaires pour marquer symboliquement les 30 ans de l’Association Pro Vistiliaco et semé les quelques ratés (dans le dessein qu’un jour la piste d’un atelier monétaire au Mont Vully puisse être matériellement attestée). J'y joins quelques pièces valaisannes « errantes » des Véragres de ma production, pour signer mon origine (Martigny) et en amitié avec la Fondation Pro-Octoduro (nom gaulois de Martigny) qui avait choisit pour sa sortie annuelle de passer par le Festival Vully Celtic ; dont le car n’a pas pu monter, faute de place. Comme quoi les migrations helvètes ou véragres, de jadis ou de nos jours ne se réalisent pas toujours comme l’on voudrait, avec ou sans César, Jules de son prénom.


Enfouissements par des petites mains innocentes des monnaies témoins offertes au Mont Vully.



Critique de l’exercice

L’activité de frappe monétaire s’est très bien déroulée et sans accident. Il convient de confesser les faiblesses suivantes :

La très forte affluence du public, soit plus de deux fois et demi les espérances fut un bonheur engendrant lors de pics quelque engorgements mémorables et notre stand d’exposition n’était plus accessible tant le poste de frappe agglutinait les spectateurs et la file des enfants frappeurs grandissait.

Les fortes pluies précédant le festival ont amolli le terrain, le sol ne répondait pas correctement aux coups de marteaux, le billot glissait légèrement et s’enfonçait.

Le billot était trop étroit, donc pas assez stable, malgré une tige de fixation plantée dans le sol et le fait que j’avais un peu enterré sa base pour le faire reposer dans la terre et non sur l’herbe. Un billot plus gros est nécessaire, c’est évident, mais, il sera aussi plus encombrant (dans la voiture et après dans mon dépôt) et lourd à porter (mauvais pour mon dos). Il est des impératifs modernes auxquels les gens ne pensent point et moi je n’avais pas anticipé l’effet des fortes pluies. Depuis, prudent, j’emporte un billot plus large, qui me permet aussi de poser le marteau et le coin mobile.

Le coin de revers (mobile) m’a paru à l’usage (des apprenants frappeurs, peu élevés en taille) trop long, compte tenu de l’élasticité du sol, de l’étroitesse du billot et des compétences limitées des frappeurs à viser droit et à plat.

Les frappeurs sont souvent trop petits tant en âge qu’en taille, même en montant sur le marchepied que j’ai destiné aux plus menus. Nombre de jeunes enfants n’ont jamais tenu de marteau, si, si, nous sommes à l’âge de la visseuse, des locatifs et des jeux électroniques, l’usage « inné » du marteau et des clous se perd, c’est une évidence, que je vous révèle.

Ceux qui maîtrisent l’emploi d’un marteau ne sont pas forcément à l’aise avec une vieille masse de 2 kg. De plus la présence du public, même dans le dos les intimide un peu et en particulier l’œil des parents. Oui, passé la prime enfance, généralement (cela n’a pas changé) l’on fait ses expériences fondamentales à l’abri du regard de ses parents ...

Sécurité oblige, je tiens le coin de revers, du coup ils ont (heureusement) un peu peur de me taper dessus les doigts. Cependant, il convient de le dire, les enfants ont moins peur de frapper que les adultes (inconscience ou surestimation de soi ? peut-être les deux, en tous les cas, ils prennent le risque).

Le principal ennui technique tient du fait qu’ils ne frappent pas assez fort. Il leur faut frapper plusieurs coups et je dois veiller à ne pas bouger les coins ou les recaler ce qui m’empêche de mettre un gant, car l’on perd toute la sensibilité nécessaire. De plus, il faut faire confiance à la jeunesse, car tôt au tard, il conviendra de leurs remettre nos clefs et nos destins, par exemple pour le choix de notre EMS (établissement médico-social). Les parents s’inquiètent souvent des compétences de leurs enfants. Je réponds que si leurs enfants sont maladroits c’est généralement un héritage transmis (que la pomme ne tombe rarement loin de l’arbre) et que de toute façon il convient d’avoir confiance, nous n’avons pas le choix, cela aide les enfants à affronter la vie pleinement, car tôt ou tard, ils nous conduiront par le bras … Heureusement au Vully Celtic, seuls trois enfants m’ont tapé sur la main, gauche.

Le frappeur amateur tend naturellement à frapper de biais car il ne tient pas le marteau droit puisque son bras fait un mouvement et qu’il n’arrive pas à compenser l’arc de cercle décrit par l’avant-bras en inclinant le ou les poignets, s’il tient le marteau à deux mains. Dès lors, si le marteau ne frappe pas au centre et à plat le haut du coin mobile le flan ne sera pas écrasé régulièrement et va glisser en biais à l’opposé du frappeur. Frappé de biais l’outil mobile (le coin de revers) bouge et la pièce, vue de profil, devient fine contre le frappeur et épaisse de l’autre côté, comme une cale ou une tranche de tarte. Ainsi, l’outil vient frapper directement une partie du coin d’avers (fixé sur le billot) et, en l’absence du métal intermédiaire du flan, va déformer le bronze du coin d’avers, le marquer et l’enfoncer … peut-être, comme sur le coin original ?

L’avantage d’un coin d’avers concave évitait que la pièce bouge trop et ne décentre la face.


Sans excès festif (je le précise) et malgré la force de mon âge, 38 ans, il m’a fallu jusqu’au jeudi matin pour me relever pleinement de la fatigue accumulée lors de cette folle aventure du Vully Celtic.


Comme le festival devait être unique, que l’outil s’est un peu endommagé et que nous avions reçu l’autorisation d’utiliser ce coin que lors de cette manifestation par le Service archéologique de l’Etat de Fribourg, j’ai choisi de le sortir de sa matrice de fer. Cependant, comme il coinçait, j’ai dû le percer et lui tarauder un pas de vis pour lui visser une tige métrique offrant un point d’ancrage solide pour l’extraire. Tel une plaque gravée d’artiste, rayée après tirage, il ne servira plus.

 
Le coin déposé.












Conclusion

L’aventure de la refrappe monétaire du quinaire à la légende Kaletedov sur le Mont Vully, 21 siècles après la perte de l’outil original et 12 ans après sa découverte fut fort appréciée du public.

Le rêve du président de Pro Vistiliaco, Monsieur Claude-Alain Gaillet a pu être partagé avec un très large public (plus de 13'000 entrées). Nul doute que nombre d’enfants conservent leurs pièces du Vully Celtic dans leurs trésors et pleins de souvenirs des expositions, animations, concerts, costumes ou des impressionnantes reconstitutions de combats.

Qui aurait pensé qu’un festival celtique puisse se dérouler sur le Mont Vully ? Inimaginable, le site n’a pas d’électricité, ni de constructions, tout était à faire, puis à défaire, tout fut fait et défait. Le Vully Celtic fut une entreprise hors du commun, rêvée par un seul homme, réalisée avec des amis bénévoles et vécue par des milliers de personnes. L’aventure créa des liens sociaux, fortifia la communauté locale et la communauté scientifique. Le festival du Vully Celtic est entré dans l’Histoire, dans la légende et il possède ses vétérans.


De telles manifestations endossent un rôle pédagogique non négligeable au profit de la culture (communauté scientifique) et de la population. Ces animations et ces reconstitutions archéologiques contrôlées reposent généralement sur la débrouillardise et le bon vouloir de quelques passionnés aussi inventifs que talentueux et audacieux qu’altruistes. Ainsi un rêve soutenu par le dicton : « si je le veux, je le peux » et transcrit en acte peut transformer une utopie en réalité, surmonter toutes les difficultés, comme contourner les tièdes et se passer des sceptiques. Si les mots passion et bénévole ne riment pas ils sont pourtant (malheureusement) indissociables. C’est de ce terreau de liberté, cumulant les individualités, les grains de folies des uns avec les autres que de telles expériences peuvent naître.

Détail de l'un des combats. 


Après ce succès, l'idée d'un bis s'est profilée pour 2010. Cependant, il n'y aura pas eu de rendez-vous en 2010 sur le Mont Vully pour une nouvelle édition du Vully Celtic, ceci en l'absence du soutien des communes qui ont préféré soutenir une autre culture, tout aussi terre à terre que l’archéologie : la Fête du motoculteur.



Des perspectives plus scientifiques

L’Atelier Ciel & Terre est prêt à expérimenter à large échelle la frappe en argent. Cependant, il nous semble qu’il conviendrait d’établir un groupe de recherche sur ce thème et de disposer des moyens d’analyses scientifiques des monnaies antiques pour orienter nos expériences et contrôler nos essais, afin que nos résultats puissent servir au mieux à l’étude de la numismatique antique.



Bibliographie

Pour en savoir plus sur le site, ses trouvailles et le coin monétaire.

KAENEL Gilbert, AUBERSON Anne-Francine, Un coin monétaire celtique au Mont Vully (canton de Fribourg), in Archéologie Suisse 19, pp. 106-111.


AUBERSON Anne-Francine & GEISER Anne, «Les trouvailles monétaires et le coin de l’oppidum du Mont Vully», in Revue suisse de numismatique no 80, 2001, p. 58-97.


KAENEL Gilbert, CURDY Philippe & CARRARD Frédéric, «L’oppidum du Mont Vully, un bilan des recherches 1978 - 2003», Academic Press Fribourg, coll. Archéologie fribourgeoise no 20, 2004.


Avec le soutien du 

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